Les Centrales de Navigation Inertielle

Ouèssè ADA 23 Sep 2023 09:43 Aérospatiale_Navigation

Les centrales de navigation inertielle (CNIs) sont des dispositifs dont l'objectif principal est d'aider à l'orientation d'un véhicule. Elles constituent l'une des premières solutions innovatives s'adressant au vieux besoin de l'Homme de toujours pouvoir se repérer et s'orienter convenablement dans son milieu.
Les CNIs permettent de déterminer la position, la vitesse et l’orientation d’un système. Il peut s'agir d'un avion, un missile, une fusée, un sous-marin, etc. Contrairement à d'autres moyens de navigation comme le GPS, le GLONASS, le Galileo, le QZSS …, la particularité et la force des CNIs résident dans le fait qu'elles sont entièrement autonomes. Elles ne se servent guère d'informations venant de sources extérieures, c'est-à-dire que, même coupé de tout système de communication, le véhicule qui en est équipé peut bien naviguer sans problème. Elles se basent sur des capteurs qui mesurent les accélérations et les vitesses angulaires du véhicule, et qui sont ensuite exploitées par un calculateur pour estimer les paramètres de navigation. Les centrales de navigation inertielle sont utilisées dans divers domaines comme l’aéronautique, le spatial, le maritime ou le terrestre.



Modèle de la CNI de SATURN (une fusée américaine)


Evolution des CNIs

Les débuts des centrales de navigation inertielle datent de la fin des années 30, pour ne pas remonter trop en arrière aux prémisses. Elles étaient non seulement très coûteuses, mais aussi encombrantes. L'américain Charles Stark Draper est très souvent considéré comme le père de la navigation inertielle (NI) pour ses travaux pionniers dans ce domaine
L'une des premières applications de l'époque est attribuée aux missiles allemands V1 et V2 durant la seconde guerre mondiale.
La NI est devenue cruciale avec le début de l'ère spatiale dans les années 50-60. Les missions telles que les vols habités des programmes Mercury et Apollo en ont en effet utilisée pour la détermination de la position des vaisseaux spatiaux.
Leur évolution par la suite a plus consisté en la miniaturisation, l'intégration avec d'autres technologies pour plus de précision et bien sûr l'ouverture aux domaines civils.


Un missile allemand V1


Comment fonctionnent les CNIs?

Une CNI c'est un ensemble de capteurs permettant de mesurer le mouvement d'un système donné dans ses 6 degrés de liberté. Elle possède trois accéléromètres et trois gyroscopes.


Les principaux composants


Les gyroscopes

Ce sont des composants qui permettent de traquer les mouvements de rotation du système. Il y'en a trois pour les trois différents axes (lacet, roulis, tangage). Le fonctionnement d'un gyroscope est basé sur le principe de conservation du moment angulaire. Lorsque l'objet tourne, le gyro résiste au changement par application de ce principe. Par intégration des efforts fournis, on arrive à trouver la vitesse angulaire puis l'angle de déviation. Le défi majeur, ou ce qui caractérise une CNI précise, c'est la capacité à minimiser les erreurs d'intégration dans les calculs.
Il en existe plusieurs types: les gyroscopes mécaniques traditionnels, et les gyroscopes à fibre optique et à laser qui sont plus modernes, plus sensibles et moins sujets à l'usure car ayant moins de pièces.



Croquis d'un gyro;
credits:Britannica


Les accéléromètres

Ils sont aussi importants que les gyroscopes. Ils suivent les mouvements de translation du système. Ils se basent sur la deuxième loi de Newton. En effet, ce n'est pas la position qui est effectivement mesurée, mais plutôt l'accélération, qui est ensuite à intégrer. Par exemple, pour un accéléromètre à capteur piézoélectrique, l'accélération linéaire fait bouger une masse interne créant une force. Cette force est ensuite convertie en contrainte mécanique sur un matériau piézoélectrique qui génère une tension électrique exploitable (convertie en valeur numérique).



principe de fonctionnement simplifié
credits: lavionnaire

Les calculateurs

Ils collectent les informations brutes venant des accéléromètres et des gyroscopes et leur donnent du sens. Ils effectuent une intégration en continu des données provenant des capteurs. Ils prennent en compte les erreurs accumulées au cours du temps, et les erreurs systématiques.


Vers le futur

De nos jours, il est très courant l'accouplement des CNIs avec un récepteur GNSS (Global Navigation Satellite System) pour plus de précision et de fiabilité. De plus, avec le développement de l'électronique, elles sont de plus en plus légères, il est alors facile de les incorporer dans des systèmes plus élaborés.



Cas particulier des HRG


Les gyroscopes à résonateur hémisphérique (Hemispherical Resonator Gyroscope en anglais) sont un type particulier de gyroscopes qui permettent d'avoir des CNIs ultra-fiables. Le fonctionnement du HRG est basé sur les principes inertiels du pendule de Foucault et de mise en résonnance.
Il utilise une coque hémisphérique, amenée à la résonnance de flexion par des forces électrostatiques générées par des électrodes reposant sur des structures de quartz. Sa mise en oeuvre nécessite vraiment une technologie de pointe, et sa composition est d'une simplicité hors pair.



Source: SAFRAN



Les domaines d'application


Les avions de ligne modernes sont dotés d'IRS (Inertial Reference System), combiné à d'autres systèmes de navigation pour le guidage. Chez Boeing, on rencontre un type FMC (Flight Management Computer), alors que chez Airbus, on parle plus de FMGS (Flight Management and Guidance System).

Armes à longue portée, comme les torpilles, missiles antinavires, ou air-air. La plus value dans ce cas est que cela permet à l'arme d'atteindre sa cible sans être détecté (ou détecté tardivement). Les CNIs sont également très utilisées pour le guidage des sous-marins, amenés à rester sous l'eau des mois durant sans remonter en surface.

On les rencontre également dans les dispositifs de correction de trajectoire de satellites.



le tableau d'un FMGS sur un airbus A340


Quelques entreprises dans le domaine


Safran Electronics & Defense

Ce groupe français a développé de nombreuses centrales hyper performantes, et très souvent brevetées. Par exemple, Geonyx™, la première centrale de navigation inertielle amphibie française, conçue pour et avec les commandos marine. Elle a été dévoilée par Safran le 29 juin 2021.
On cite aussi les HRG Crystal™ et Onyx™, qui révolutionnent les centrales de navigation de haute performance navales.



  • Northrop Grumann Corporation, entreprise américaine spécialisée dans les applications aérospatiales et militaires.
  • Thales Group (France)

  • KVH Industries, Inc. (USA)

  • Sagem, filiale du groupe Safran

  • Sparton Navigation and Exploration (USA)

  • VectorNav Technologies (USA)



Les limites des centrales de navigation inertielle


Les CNIs sont très utiles et importantes, mais ce qui constitue en majorité leur force, est aussi leur talon d'Achille. Du fait qu'elles sont par définition autonomes et ne puisent pas d'informations venant de sources extérieures, il y a une certaine accumulation d'erreurs sur les calculs inertiels au fil du temps, pouvant occasionner une dérive importante de la position. Ce problème a donné lieu à un autre assez laborieux, la nécessité de recalibrage et d'alignement réguliers.
Par ailleurs, les capteurs sont plus ou moins sensibles aux chocs et aux vibrations.
Il est important de relever également le coût élevé de leur production.
De plus, les CNIs traditionnelles sont volumineuses et plus lourdes, inconvénient majeur dans beaucoup d'applications.



Autres ressources

Pour les plus curieux, je vous invite à visionner cette vidéo du leader français Safran Electronics & Defense pour découvrir davantage sur les CNIs et mieux cerner le fonctionnement des HRG.



SAFRAN: Navigation inertielle : Comment garder le cap !


SOURCES
www.lavionnaire.fr
www.safran-group.com/fr/actualite

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El Béchir

posté le 2023-09-23 20:08:00

Instructif


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