Silencieusement en orbite autour de la terre depuis 1998, l'ISS représente autant une prouesse technologique sans précédent qu'un symbole parfait de la collaboration internationale en matière de sciences et exploration spatiale. Sa structure complexe, fascinante et le montage progressif des modules est comparable à un véritable jeu de Lego spatial. Ses dimensions gigantesques côtoyant la taille d'un terrain de football offrent une plateforme unique et idéale pour de nombreuses expériences technologiques. Son environnement inédit de microgravité ne fait que repousser les frontières de notre compréhension de l'univers.
Dans cet article, nous allons à l'exploration de la Station Internationale Spatiale, depuis l'époque de sa mise en place audacieuse jusqu'à son statut actuel en tant que plateforme de recherche de premier plan dans l'espace.
Nous nous pencherons également sur ses contributions scientifiques majeures, les défis auxquels elle est confrontée, et les conditions de travail des astronautes en son sein.
L'ISS est le fruit d'une longue expérience de l'Homme en matière d'exploration et recherche spatiales. Près de 30 ans avant que l'ISS ne voit le jour, l'Union Soviétique avait déjà commencé un programme de stations spatiales à travers le projet Saliout qui s'est étendu entre 1970 et 1980. Premières stations spatiales habitées, les stations Saliout pouvaient accueillir des cosmonautes pour des missions de plusieurs semaines, dont les missions et objectifs resteront les mêmes que les raisons d'existence de l'ISS aujourd'hui. Le projet Saliout fut le prédécesseur de la station spatiale russe MIR qui signifie "PAIX" en russe. Elle a été en orbite autour de la terre de 1986 à 2001 avant d'être désorbitée et entrée dans l'atmosphère en fin Mars 2001 pour finir son séjour dans l'océan Pacifique.
Les expériences, succès, échecs et défis relevés tout au long de cette période ont permis de mieux mûrir et améliorer la conception de l'ISS. En 1983, le président des Etats Unis d'alors, Ronald Reagan exprimait son soutien à la coopération internationale dans le domaine de l'exploration spatiale. Il rappelait que cette initiative audacieuse incarnait l'esprit d'exploration et de coopération qui animait l'humanité depuis des siècles et qu'en unissant nos efforts avec les partenaires internationaux, ils construiraient une plateforme qui servirait de porte ouverte vers de nouvelles découvertes, de nouveaux horizons et de nouvelles possibilités.
Beaucoup d'agences spatiales se sont très vites jointes à la NASA dans cette aventure, dont l'ESA en Janvier 1985, l'ASC en Avril 1985 (Canada), et la JAXA (Japon) un mois après. Roscosmos(Russie) qui s'est avéré un partenaire clé en ce qui concerne les lancements n'a rejoint le bateau qu'en 1993. Il a fallut attendre le 25 Mai 2012 pour assister au premier ravitaillement effectué par une entreprise privée, un vol commercial avec le SpaceXDragon.
Le premier module du processus d'assemblage de la station, le module russe Zarya, a été lancé le 20 Novembre 1998 via la fusée Proton. Deux semaines plus tard, en décembre 1998, c'était le module américain Unity. Le troisième module, vezda est arrivé en Juillet 2000, ouvrant désormais la voie à une occupation permanente depuis le 2 Novembre 2000. Au départ, la station ne pouvait accueillir que 3 astronautes, mais depuis 2009, elle peut en recevoir jusqu'à 6 à la fois.
En Février 2001, Destiny le module de laboratoire principal des USA a été mis en orbite au cours de la mission Atlantis STS-98. 7ans plus tard, le laboratoire européen Columbus a été mis en place, et juste un mois après, celui des japonais, Kibo. En 2003, l'explosion de la navette spatiale Columbia a considérablement mis en retard l'assemblage de la station.
L'ISS est visible depuis la terre, mais il faut savoir où regarder et à quel moment. Elle file à la vitesse vertigineuse de 28000km/h afin de pouvoir rester en chute libre permanente, en orbite basse à environ 400km. Elle fait 16 fois le tour de la terre par jour, soit d'un aller-retour Terre Lune en une journée. Avec 13 modules pressurisés en son sein et un volume d'espace habitable de 400m3, elle fait 110m long, 75m large, 30m de hauteur pour 420 tonnes. Huit(8) panneaux solaires doubles de 35m sur 12m de largeur chacun fournissent une puissance de plus de 120 KW.
L'ISS c'est avant tout un Laboratoire de recherche et de collecte de données. Elle accueille des expériences variées dans divers domaines comme la biologie pour l'étude du comportement des êtres vivants en microgravité, les effets et l'adaptation de l'Homme en apesanteur, l'exobiologie, la science des matériaux, l'astronomie, la météorologie et la préparation de futurs voyages spatiaux, pour ne citer que les principaux. Les opérations vers la station sont surtout des missions de ravitaillement, de maintien en altitude, de maintien d'orientation, d'assemblage, de maintenance et d'entretien.
Actuellement il y a 11 astronautes sur la station, dont 2 femmes et 9 hommes. Aux 7 astronautes de l'expédition 67 qui y étaient déjà, se sont ajoutés 4 astronautes de la mission Axiom-2, lancée le 21 Mai 2023 depuis le centre spatial Kennedy. La durée des séjours varie en fonction de la mission, et va généralement de 3 à 6 mois. Les astronautes sont sur l'ISS pour un long séjour en apesanteur, il est donc crucial de les protéger contre les radiations et les effets de la microgravité. Les stations de contrôle au sol veillent également à éviter les débris spatiaux et les micrométéorites qui s'aventurent en orbite basse.
A bord de l'ISS, on redevient "enfant", on apprend de nouveau tout ce qu'on faisait très bien et sans même y penser. Que ce soit manger, boire, se brosser les dents, ou aller aux toilettes, tout est complexifié par l'apesanteur. Les repas sont conditionnés sur terre de sorte à contenir les calories nécessaires au métabolisme des astronautes, tout en étant le plus léger possible et pouvant être conservés pendant longtemps. Les plats les aident également à ralentir les effets de l'adaptation de l'organisme à l'environnement spatial.
Parmi les aliments servis, on distingue les réhydratables, les thermostabilisés, les irradiés, ainsi que des aliments frais et naturels disponibles après un approvisionnement récent. Pour éviter que la nourriture ne s'éparpille dans les modules, les aliments sont conservés dans des tubes et sachets qu'il faut presser. Les dentifrices des astronautes sont comestibles, ils n'ont juste qu'à faire attention à ne pas trop ouvrir la bouche en se brossant. Dans les toilettes, la chasse d'eau fait place à un mécanisme d'aspiration et des sangles aident l'astronaute à ne pas s'éloigner. Les déchets solides sont comprimés et évacués plus tard, alors que les urines sont récyclées.
Le maintien en forme des astronautes est crucial à bord. Deux(2) heures d'exercices physiques au minimum sont requises par jour, mais malgré tout, cela ne suffit pas pour compenser la perte musculaire et la densité osseuse, ostéopénie. Vous remarquerez qu'à leur retour, les astronautes n'arrivent pas à bien tenir sur les pieds. C'est le syndrome de réadaptation orthostatique posturale (SROP) ou "vertige spatial". En apesanteur, les muscles pour la posture sont très peu sollicités, et le système vestibulaire, responsable de la perception de l'équilibre, "s'affaiblit", perturbé par le retour de la gravité. Ils suivent tous à leur retour sur terre un programme de réadaptation et un renforcement musculaire.
L'ISS restera indéniablement un parfait exemple de coopération internationale réussie. Elle est cogérée par six (6) agences spatiales à savoir la NASA, ROCOSMOS, l'ESA, la JAXA, l'ASC et l'AEB (Brésil). Pour le financement, elle sait compter sur l'implication de seize(16) pays dont les USA, la Russie, le Canada, le Japon, le Brésil et 11 pays européens dont la France, le Royaume-Uni, le Danemark, l'Allemagne, l'Italie, la Belgique, la Hollande, la Norvège, l'Espagne, la Suède, et la Suisse. Le transport des astronautes a été assurée pendant longtemps par la fusée russe Soyouz, et deux bases sont équipées pour les lancements depuis la terre en direction de l'ISS. Il s'agit de Baikonour au Kazakhstan (la plus ancienne et celle qui a été le plus utilisée) et Cap Canaveral aux Etats-Unis.
Le "projet ISS" fait de plus en plus face à des critiques. D'aucuns déplorent le coût d'exploitation et de maintien de fonctionnement très élevé, comparé aux résultats tangibles engrangés depuis lors. Lorsque vous faites des expériences sur la croissance des plantes en micropesanteur en vue d'une éventuelle prochaine colonisation de l'espace, il est bien difficile de pouvoir convaincre la grande masse pourquoi il n'est pas plutôt légitime d'investir cet argent dans des projets plus urgents et des problèmes réels vécus sur terre. La question donc du retour sur investissement se pose. Les avantages scientifiques et technologiques engrangés justifient ils vraiment le coût de construction et de fonctionnement monstrueux? De plus, à repenser au contexte de lancement du projet, beaucoup voient bien plus en l'ISS un outil d'affirmation politique que scientifique.
La fin de l'utilisation de la station était prévue à l'horizon 2024, mais plusieurs prolongations et reports ont eu lieu après. Une des questions les plus partagées, jusqu'à quand l'exploitation pourra-t-elle perdurer?
En début 2023, les partenaires se sont mis d'accord pour étendre l'exploitation jusqu'en 2030 et en 2028 pour la Russie.
Parmi les scénarios de la fin de l'ISS, l'idée de la désorbitation contrôlée comme ce fut le cas pour MIR revient assez. Il s'agira de la laisser entrer dans l'atmosphère terrestre, dont une grande partie sera désintégrée lors de la rentrée. Il faudrait dans ce cas une minutieuse planification pour assurer une sécurité maximale.
Certains pensent à une transition vers une station spatiale commerciale, une exploitation par des entreprises privées pour le tourisme par exemple.
Il y a aussi l'hypothèse de démantèlement et recyclage des pièces pour d'autres projets spatiaux, comme par exemple la construction d'une autre base plus éloignée, qui répond aux besoins futurs de l'exploration spatiale, un avant-centre pour des destinations comme la lune, et surtout la planète rouge. L'avenir nous dira la vérité.
Depuis ses débuts modestes jusqu'à sa position actuelle en tant que laboratoire orbital de renommée mondiale, la station spatiale internationale reflète parfaitement l'esprit fort de collaboration qui anime l'exploration spatiale.
Des astronautes de divers horizons, des cosmonautes, des taïkonautes y ont partagé leurs compétences et leurs connaissances pour nous permettre de mieux
comprendre notre univers, et surtout de nous rappeler qu'à seulement quelques kilomètres au dessus de nos têtes, outre nos appartenances, nous devenons tous avant tout des citoyens de la Terre, une planète qui reste vulnérable face à l'immensité des galaxies.
Peu importe comment son histoire va se terminer, cette pure merveille d'ingénierie a su démontrer notre capacité à vivre et à travailler ensemble, jusque dans un environnement extrême et hostile, repoussant davantage les limites du possible. Alors que nous continuons notre trajet vers les mystérieux confins de l'univers, nous pourrons toujours regarder vers l'ISS comme une source d'inspiration et de fierté pour ce que l'humanité peut accomplir.
Tres bel article
good job