Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais que vous jetiez un coup d'œil sur cette vidéo. Il s'agit de deux atterrissages fondamentalement différents.
Le premier, c'est un atterrissage en douceur, d'un airbus A330 de AirAsia.
Le deuxième, c'est un atterrissage d'un Boeing 737 de Ryannair, un atterrissage plutôt secouant (vous remarquerez que l'avion a même rebondi sur la piste).
La majorité des gens choisissent généralement le premier, et même félicitent le pilote pour l'atterrissage en douceur. Le problème c'est que c'est un atterrissage qui requiert une longue distance de piste. Il peut même être dangereux si la piste est contaminée, car cela peut occasionner des sorties de piste.
LES SORTIES DE PISTE.
Une chose est d'atterrir, et une autre est de pouvoir arrêter l'avion. Les petits avions du type A320 ou B737, pèsent entre 50 et 70 tonnes. Considérant qu'en moyenne, un avion atterrit avec une vitesse d'environ 260km/h, imaginez l'ordre de son énergie cinétique à l'atterrissage. Un des défis majeurs de l'aéronautique a été de trouver les moyens de dégrader le plus vite possible cette énergie cinétique une fois que l'avion touche le sol. Autrement, comment faire pour l'arrêter, moyennant une courte longueur de piste?
La solution la plus classique, c'est de faire recours aux freins. Mais l'expérience a montré qu'il faut bien plus que de simples freins pour ralentir ces géants. C'est pour cette raison que les inverseurs de poussée (en anglais thrust reversers) ont été intégrés au système de freinage.
Qu'est-ce que c'est, quel est son rôle au juste et comment ça marche?
La première et principale utilité des inverseurs de poussée c'est d'aider à ralentir l'avion à l'atterrissage ou l'aider à augmenter considérablement sa décélération. Ce sont des dispositifs incorporés aux moteurs de l'avion. Leurs modèle ou principe de fonctionnement dépendent intrinsèquement du type de moteurs, de la taille et du design de l'avion. Ils viennent dans ce sens, en renforcement aux freins (pour ne pas leur causer trop de stress) et aux ground spoilers.
Cependant, on peut se servir des thrust reversers dans bien d'autres situations.
Une utilité qui s'approche de celle déjà énoncée, c'est qu'ils sont hautement sollicités, sinon indispensables en cas de piste glissante, enneigée, ou en cas d'atterrissage sous pluie. Les freins seuls risquent dans ce cas de ne pas pouvoir arrêter l'avion. Autrement, l'effort qui sera fourni sur eux risque de les endommager très rapidement.
En cas de décollage avorté, il est indispensable de se servir des inverseurs de poussée pour ne pas sortir de la piste, d'autant plus que le pilote en a dejà utilisée assez pour sa précédente accélération.
Les avions dont les engins sont montés à l'arrière et non en dessous des ailes peuvent utiliser les inverseurs de poussée pour reculer d'eux même pour s'aligner sur la piste ou lors du taxiing, au lieu de faire recours aux camions pour le pushback.
Lors de l'atterrissage (tout comme au décollage), il est important pour le pilote de garder le nez de l'avion aligné sur la ligne centrale de la piste. L'avion a en effet parfois tendance à virer à gauche ou à droite. Là, la symétrie de force appliquée par les inverseurs de poussée peuvent aider à cette manœuvre.
Dans cet article sur les turbofans et les turbopropulseurs, nous avons vu que la poussée est créée par application de la troisième loi de Newton, le principe de l'action réaction. Le flux d'air chaud des moteurs est accéléré vers l'arrière par les tuyères, créant une force opposée qui pousse l'avion vers l'avion. Eh bien, le but des inverseurs de poussée c'est justement d'inverser ce processus. Si l'on arrive cette fois à accélérer les gaz vers l'avant, la force de réaction serait dirigée vers l'arrière, s'opposant à l'avancée de l'avion.
Là nous avons l'idée, le principe d'application. Maintenant, comment arriver à renverser le flux d'air des engins? Comment empêcher les gaz d'aller vers l'arrière alors que les moteurs sont conçus à la base pour cela?
Plusieurs solutions ont été proposées au fil des années, avec des mécanismes plus ou moins différents, les uns plus performants que les autres, mais tous se basant sur le même principe de Newton.
Ces dispositifs ont commencé à être utilisés sur des avions depuis la fin des années 1940. L'un des premiers types les plus notables est le "target" reverser, développé par Curtiss Wright au début des années 50. Il utilisait une série de volets et déflecteurs mobiles pour renverser la direction des gaz. Ce système a été utilisé sur des modèles d'avion comme le Curtiss C-46 Commando, et adapté plus tard pour les Douglas DC-6 et DC-7.
Il est important de noter que ce n'est qu'en 1959 qu'un avion commercial a été équipé d'inverseurs de poussée. C'était le Sud-aviation caravelle, un avion de ligne biréacteur du constructeur français Sud-aviation (à l'époque), et destiné aux vols court et moyen courrier. Au fil du temps, d'autres types ont été développés, plus performants, plus légers, plus faciles à maintenir au point où les inverseurs de poussée sont devenus incontournables, une mesure de sécurité standard dans l'aviation, civile ou militaire.
C'est un système actionné hydrauliquement qui utilise une sorte de seau déployé en V vers l'arrière. Quand le dispositif n'est pas actionné, c'est ce bucket qui forme la buse d'échappement du moteur. Une fois que le pilote active le processus, les actionneurs le déploient et couvrent le flux de gaz qui sort vers l'arrière le ramenant vers l'avant. Il faut noter que ce système n'est pas très efficace, et il est plus utilisé sur des appareils relativement petits.
C'est un système qui est activé pneumatiquement. Il est plus utilisé sur les turbofans. Il serait moins efficace sur les turbojets comparé au type précédent. Pourquoi? Le clamshell door reverser n'affecte pas vraiment le coeur du moteur, c'est-à-dire, il n'agit pas sur les gaz chauds du moteurs. Eux continuent leur chemin. Il bloque au contraire le flux d'air des fans, le bypass. (En fait, sur les turbofans, la poussée vient quasiment du flux des fans, et pas des tuyères. Je vous renvoie toujours sur cet article si vous voulez plus de détails sur les bypass).
C'est un système beaucoup plus avancé. Il fait office de deux versions différentes.
Il utilise une série de vannes mobiles, qui, actionnées donnent l'impression de diviser le moteur en deux (d'oû le nom en cascade). Il est très efficace pour les avions ayant un bypass ratio très élevé. Il produit une très grande quantité de poussée inversée, mais à l'inverse, il est plus complexe et assez capricieux et onéreux côté maintenance.
C'est le deuxième type de cold-stream reverser. Ce sont vraiment les deux types les plus répandus actuellement au niveau des avions de ligne. Le door-type lui est plus utilisé sur des petits moteurs. Il est formé de sortes de portières qui s'ouvrent sur un axe horizontal. Le dispositif est plus simple, léger et plus aérodynamique vu qu'il utilise des battants relativement petits par rapport au moteur lui même. Mais cela fait qu'il produit moins de poussée inversée parce que les battants, petits, ne couvrent qu'une partie des gaz, donc juste une petite quantité est redirigée vers l'avant.
C'est un type beaucoup plus moderne, qui s'affranchit des systèmes mécaniques. ETRAS signifie Electric Thrust Reverser Actuation System. C'est un système qui est actionné de façon électrique. Il est de loin plus léger, et nécessite beaucoup moins de maintenance (élimination de l'utilisation des liquides corrosifs des systèmes hydrauliques). Le futur est dans ce système, surtout avec le développement du fly-by-wire. Il y a deux types d'avions qui exploitent ce système: d'une part la configuration de l'inverseur de poussée des nacelles de l'A380, composée d'un D-duct composite en deux parties, et d'autre part les nacelles composites monobloc O -inverseur de poussée sur le Comac C919 (constructeur chinois).
En réalité, à l'atterrissage, les avions exploitent généralement, simultanément les 3 mécanismes pour leur décélération: les freins du train d'atterrissage, les spoilers sur les ailes, et les inverseurs de poussée. Il est toutefois recommandé au pilote de ne pas utiliser les inverseurs de poussée une fois que la vitesse de l'avion est inférieure à 60 nœuds. En effet, quand l'avion est à l'arrêt ou roule assez lentement, ils risquent d'absorber des débris du tarmac dans les moteurs, ce qui pourrait les endommager.
Les avions militaires eux utilisent d'autres dispositifs de freinage. Certains avions de chasse déploient des parachutes vers l'arrière à l'atterrissage pour une décélération plus rapide. Dans le cas particulier des portes avions, on utilise des brins d'arrêt (des cordes) et l'avion est lui équipé de crosse d'appontage (une sorte de crochet) qui vient s'accrocher à la corde et le tire vers l'arrière.
great article !!! congrats
Very interesting 👍. Now I enderstand what the plane stop.
Always Nice!!!!!