Vous vous êtes sûrement une fois demandés pourquoi il était impossible pour les avions de reculer tous seuls. Pourquoi pas de marche arrière au sol comme un véhicule ou en l'air comme un hélicoptère?
Depuis longtemps, face à cette question, les ingénieurs aéronautiques ont toujours été catégoriques:
hors de question. Du moins, pas en l'air en tout cas. Pour comprendre le sens de cette position extrême, il convient de revenir sur ce qui garde l'avion en l'air:
la voilure.
Fondamentalement, les ailes ont pour rôle de générer de la portance, une des quatre forces aérodynamiques de base (en plus du poids _"weight"_, de la trainée _"drag"_ et de la traction ou poussée _"thrust"_).
La portance est la force qui est destinée à contrecarrer l'effet du poids de l'avion pour assurer la sustentation.
Son intensité est fonction du carré de la vitesse de l'avion. En cinématique, on matérialise généralement la vitesse de marche arrière par une vitesse négative, cela veut dire que la vitesse de l'avion doit d'abord s'annuler. Ce qui est d'ailleurs facile à comprendre: Pour reculer, il faut d'abord s'arrêter un petit bout de temps. Pour annuler la vitesse, il va falloir arrêter les moteurs et/ou inverser la poussée des réacteurs. Pourtant à V= 0, l'avion perdrait complètement sa portance. Pour le redresser, il faudrait redémarrer les moteurs en l'air, processus qui prend trop de temps et demande beaucoup de checklists aux pilotes d'autant plus qu'on ne peut pas allumer tous les moteurs simultanément. Par conséquent, l'avion cabrerait avant même la fin du redémarrage: impossible de le redresser. On dit qu'il a décroché. Il va tomber en chute libre.
Ceci n'est qu'une raison parmi tant d'autres un peu moins frappantes. Donc pas la peine de parler de marche arrière en l'air.
MAIS AU SOL OUI.
Les avions le faisaient depuis longtemps d'ailleurs, mais grâce au
pushback (anglicisme, qui veut littéralement dire "pousser vers l'arrière"). Dans les aéroports, vous remarquerez toujours des camions assez particuliers, très bas et robustes, qui aident les avions à aller au parking ou de sortir pour rejoindre la piste de décollage. Ils se connectent à la roue avant de l'avion, la soulève un peu, pour faciliter la traction. Durant cette manœuvre, l'avion roule doucement sur le tarmac et les passagers ont le temps de bien admirer l'aéroport et les autres avions.
Cependant, ce n'est pas très apprécié du personnel aéroportuaire car c'est un processus qui prend trop de temps, et parfois les camions sont en manque. (Si vous faites attention dans les avions, vous entendrez une fois le pilote dire qu'il est actuellement en train d'attendre un camion pour tracter). Pourtant chaque seconde compte dans les aéroports: il faut libérer la piste le plus tôt possible pour un autre avion. Comment faire?
Une réponse assez intuitive serait d'utiliser
l'inversion de poussée. Et oui, ça marche très bien en terme de résultat escompté. Cependant ce n'est pas vraiment une bonne alternative, surtout pour les avions de ligne dont les réacteurs sont montés en bas d'ailes. En effet, le thrust-reversal comme on l'appelle en anglais, fait énormément de bruit, il est vraiment très assourdissant. Un autre soucis, il est impossible pour le pilote de voir derrière l'avion quand il recule parce que le fuselage est très long au point où une sorte de rétroviseur ne servirait à rien. De plus, des débris sur le
tarmac* risquent non seulement de heurter le personnel au sol, les fenêtres du terminal, mais également de perforer l'avion lui-même ou entrer dans les réacteurs. D'ailleurs il faudrait un plein régime pour faire reculer l'avion, ce qui nécessite plus de kérosène avant vol et après vol et donc plus de dépenses pour les compagnies, sans parler de l'incroyable émission de CO2 qui s'en suivrait.( La planète avant tout).
Les ingénieurs ont continué de réfléchir à d'autres alternatives, moins énergivores, plus rapides et pratiques sur les aéroports denses; et finalement le
wheeltug a vu le jour.
Vous avez remarqué que l'extrait est en anglais. C'est le cas pour la plupart des recueils, documentaires et reportages en aéronautique ou dans beaucoup d'autres domaines d'ailleurs. Comme quoi c'est une langue qu'il ne faut pas du tout négliger.
Bref, sur la vidéo, on a couvert les moteurs pour montrer qu'ils n'interviennent pas du tout dans la manœuvre. C'est un système embarqué sur la roue avant et qui utilise
l'APU* (Auxiliary Power Unit) installé sur la queue de l'avion. Il est actuellement opératif sur des prototypes de Boeing 737 comme sur la vidéo, et a déjà réussi plusieurs tests.
Tenez vous bien, bientôt vous verrez partout dans les aéroports des avions reculer ou braquer assez facilement comme des cars.
*Le tarmac c'est le terme en aviation pour parler de la partie de l'aéroport destiné au trafic des avions comme les parkings, les taxiways; mais attention pas la piste d'atterrissage.
*L' APU c'est un petit moteur qui sert à démarrer les réacteurs de l'avion. Il initialise le cycle de rotation des fans, et des étincelles pour la combustion du comburant.
Pour plus de détails sur le wheeltug, allez lire
cette vidéo
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