
Les chouettes : maîtresses du vol silencieux
Les chouettes sont des rapaces nocturnes reconnues pour leur capacité à voler en silence, une caractéristique qui les distingue des autres oiseaux. Elles sont présentes sur presque tous les continents, avec plus de 200 espèces différentes. Les chouettes, très souvent confondues aux hiboux, sont particulièrement adaptées à la chasse de nuit grâce à plusieurs caractéristiques uniques, notamment leur ouïe et leur vision exceptionnelles.
Comparaison du vol des chouettes à celui d’autres oiseaux
Un documentaire de BBC Earth met bien en exergue la particularité des chouettes en vol. L’expérience a été réalisée avec un pigeon, un faucon pèlerin (redouté pour sa vitesse) et une chouette. Elle a consisté en l'enregistrement des battements des ailes des trois oiseaux, et en l'analyse du spectre du bruit émis. Contrairement aux deux, la chouette est passée inaperçue, malgré la sensibilité accrue des microphones installés dans la chambre. En général, elles font 18 dB de moins par rapport aux autres oiseaux, un atout en or pour un chasseur de son type.
Enregistrement des bruits des battements des ailes des trois oiseaux: Le pigeon en premier, puis le faucon, et enfin la chouette. Remarquez que cette dernière n'a émis pratiquement aucun bruit durant son vol
Le secret des chouettes
Les chouettes volent silencieusement grâce à plusieurs adaptations anatomiques et physiologiques uniques.
Structure de plumes spécialisées
Les plumes primaires des ailes des chouettes ont des bords dentelés qui réduisent les turbulences de l'air. De plus, leur surface est recouverte d'une fine structure veloutée qui absorbe les vibrations sonores. Elles sont de surcroit munies de plumes secondaires souples qui amortissent les courants d'air et réduisent encore davantage le bruit de frottement.
Grande envergure
Le rapport entre l'envergure de leurs ailes et le poids du corps leur permet de beaucoup plus planer et de battre lentement des ailes. En effet, comparativement à leur corps, elles possèdent d’immenses ailes. Avec une voilure pareille, l’oiseau n'a pas besoin de trop battre des ailes après le décollage et peut donc se contenter de planer, minimisant ainsi le bruit.
Réduction des turbulences
Au niveau de leurs pattes, les plumes qui les recouvrent jusqu’aux serres jouent un rôle dans la réduction des turbulences en minimisant les perturbations de l’air sous l’oiseau. Toutes ces adaptations leur permettent de surprendre leurs proies et d'améliorer leur propre perception auditive en éliminant les bruits parasites de leur vol.
Credits: BBC EarthApplications dans l’Aéronautique : de la chouette aux avions silencieux
Le vol silencieux des chouettes et hiboux a inspiré des recherches en aéronautique pour réduire le bruit des avions. Voici quelques analogies.
Bords dentelés et winglets
Les chouettes ont des bords de plumes dentelés qui réduisent les turbulences de l’air. En aéronautique, on retrouve un principe similaire avec les winglets. Ce sont les extrémités courbées des ailes qui diminuent les tourbillons marginaux et améliorent l’aérodynamisme.

Winglets d'un Airbus A350
Revêtement absorbant les vibrations
Les plumes souples des chouettes absorbent les vibrations sonores, limitant le bruit. Certains avions utilisent des matériaux absorbants (fibre de carbone, composites à base de fibres de verre et de résine époxy) et des traitements de surface spéciaux (polymères spécialisés, mousse acoustique) pour réduire le bruit des flux d’air, notamment sur les bords d’attaque des ailes et des hélices.
Réduction de la vitesse de vol pour minimiser le bruit
Les chouettes volent lentement grâce à leurs ailes larges, minimisant la production de bruit aérodynamique. En aviation, en réduisant la vitesse d’approche et en améliorant le design des ailes, il est possible de limiter le bruit, ce qui est crucial pour les avions commerciaux près des aéroports.
Ailes à grande envergure et faible charge alaire
Les chouettes ont une grande envergure par rapport à leur poids, leur permettant de planer avec un minimum d’effort et de bruit. Les avions à fort allongement d’aile (comme les planeurs et certains avions commerciaux) adoptent ce principe pour améliorer leur rendement aérodynamique et réduire le bruit.
Etudes concernant les moteurs
Des chercheurs étudient activement les mécanismes du vol des chouettes pour concevoir des hélices d’avion plus silencieuses, des pales d’éoliennes optimisées, et des drones furtifs inspirés de ces rapaces nocturnes. Mais il faut noter qu’il y a déjà depuis longtemps, une technologie utilisée sur les nacelles des moteurs d’avion, les chevrons, permettant de réduire le bruit. On les retrouve notamment sur les moteurs des Boeing 787 et 747-8. Ce sont des bords dentelés situés à l'arrière des nacelles des moteurs, au niveau de la sortie des gaz d'échappement, et parfois sur les inverseurs de poussée. Le but est d’améliorer le mélange entre les flux d'air à différentes vitesses afin de réduire le bruit généré. En effet, dans un moteur d’avion, il y a deux flux principaux : l’air chaud et rapide expulsé par le cœur du moteur (passant par le compresseur et la turbine) et l’air froid et plus lent venant du fan (bypass). Sans chevrons, la rencontre brutale de ces flux crée des turbulences et des ondes sonores fortes. Les chevrons permettent un mélange plus progressif des deux flux, réduisant ainsi ces turbulences et donc le bruit. En adoucissant la transition entre les flux d'air, les chevrons réduisent les basses fréquences sonores qui sont celles perçues au sol lors des décollages et atterrissages.

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